En droit français, et selon l’article 931 du Code civil, les donations entre vifs doivent normalement être constatées par des actes notariés. En effet, la clause de répartition inégale des bénéfices au profit des nus propriétaires de parts sociales ne peut constituer le support d’une donation indirecte.
L’Administration et la donation
Mais dans la pratique, les donations peuvent être effectuées sous d’autres formes. La forme de la donation n’a aucune influence sur l’exigibilité des droits de mutation à titre gratuit, parce que l’administration fiscale n’est en aucun cas juge de la validité des actes. Ainsi, ces droits peuvent être perçus sur une donation faite sous seing privé, et ce, en dépit de sa nullité.
L’Administration peut réclamer l’impôt :
- Sur les donations déguisées : les libéralités qui ont l’apparence d’un acte effectué à titre onéreux, mais qui en réalité, constitue un acte de cession sans contrepartie ;
- Sur les donations indirectes : les conventions, qui, sans aucune simulation, revêtent accessoirement le caractère d’une libéralité. Mais ce type de libéralité particulière reste soumis aux conditions de fond applicables à toutes les donations ordinaires, même s’il se trouve dispensé des formalités exigées à l’article 931 du Code civil (l’intention libérale du donateur, le dessaisissement immédiat et irrévocable du donateur entraînant son appauvrissement, l’acceptation par le bénéficiaire ayant pour conséquence un enrichissement à due concurrence).
Toutefois, l’Administration fiscale précise que dans le cadre d’un contrat de société, l’insertion d’une clause de répartition inégale des bénéfices au profit des nus propriétaires de parts sociales ne peut en aucun cas constituer le support d’une donation indirecte, selon un arrêt de la Cour de cassation en date du 18 décembre 2012.
Mieux comprendre le principe de donation indirecte
A titre d’illustration, une donation indirecte pourrait être la renonciation gratuite à une succession au profit de personnes désignées.
Prenons également l’exemple d’une famille composée d’un couple et de deux enfants, dont chaque membre de la famille détient chacun une fraction des parts représentatives du capital d’une société civile, en pleine propriété. Les époux détiennent l’usufruit de la majorité des parts, dont les enfants sont nus propriétaires. Sur cette base, les époux ont vocation de percevoir 95% des bénéfices distribués.
Par la suite, des décisions unanimes émanent d’une assemblée générale des associés : pendant cinq ans, la répartition des dividendes s’effectuera à proportion de 17% pour chacun des parents et de 30,5% pour chacun des enfants nus propriétaires. L’Administration fiscale se saisit alors du dossier, en considérant que les époux, en renonçant dans une proportion de 61% au profit de leurs enfants, à leur droit à distribution de dividendes pendant la période considérée, auraient consenti à leurs enfants une donation indirecte.
Mais pour les juges de la Haute juridiction, ce n’est pas le cas. En fait, ils considèrent d’une part que la modification de la répartition de la part de chaque associé dans les bénéfices de la société ne pouvait résulter que d’une décision collective des associés, et qu’en participant à cette décision, les usufruitiers ne peuvent consentir à une donation ayant pour objet un élément de leur patrimoine.
D’autre part, les bénéfices réalisés par une société ne devraient pas participer de la nature des fruits que lors de leur attribution sous forme de dividendes, lesquels n’ont pas d’existence juridique avant la constatation de l’existence de sommes distribuables par l’organe social compétent et la détermination de la part attribuée à chaque associée, de sorte qu’en l’espèce, les usufruitiers n’ayant été titulaires d’aucun droit, n’ont pu consentir aucune donation ayant les dividendes pour objet.
Ainsi, les dividendes n’avaient donc pas encore existé juridiquement lors de l’assemblée générale des associés. Ainsi, les usufruitiers n’étaient donc pas titulaires d’aucun droit sur les dividendes attribués aux nus propriétaires. Par conséquent, aucune donation n’avait pu être consentie, faute d’objet existant.
Enfin, un arrêt de la Cour de cassation en date du 21 juin 2011 précise que « la preuve de la donation est apportée et notamment l’acceptation tacite des donataires, dès lors que les nus propriétaires ont fait figurer ces titres en pleine propriété, dans leur déclaration d’impôt de solidarité sur la fortune et ont encaissé les revenus produits par ces titres ».